APPEL DES SECTEURS SOCIOCULTURELS POUR LA RELANCE DE LA CONCERTATION AVEC LE POLITIQUE
SOCIOCULTUREL MALMENÉ, DÉMOCRATIE EN DANGER !
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Les organisations représentatives et fédératives des secteurs des bibliothèques publiques, de l’éducation permanente, des centres culturels, les programmateurs, des musées wallons et des centres d’expression et de créativité se sont unis pour tirer la sonnette d’alarme avec cette même interrogation : le socioculturel est-il malmené voire menacé?
Dans un contexte globalement morose, où les perspectives économiques peu réjouissantes tentent d’infléchir les politiques culturelles dans leur nature et leurs fondements, nous nous interrogeons. Vers où allons-nous ? Avec quels moyens ? Quelles missions tente-t-on de nous assigner ? Chaque ministre, à quelque niveau de pouvoir que ce soit, souhaite marquer cette législature de son empreinte, avec des marges de manœuvre extrêmement réduites… mais à quel prix ?
Les secteurs que nous représentons ont le sentiment d’être mis à mal depuis quelques années : non-indexation et gel prolongé, voire diminution des subventions de fonctionnement et d’activités; rabotage des aides régionales à l’emploi ou, à tout le moins, réflexion sur leurs missions prioritaires et leur possible réorientation vers des politiques axées sur la formation par exemple ; retard dans le traitement de nombreux dossiers (reconduction de conventions et/ou contrats-programmes) ; financement partiel de certains décrets ; application non financée des décrets sectoriels récemment votés par manque de moyens, etc.
Ces mesures sont couramment présentées comme « indolores » mais, additionnées, elles causent une perte vitale pour les secteurs que nous représentons.
Il en résulte une situation de fragilisation et, inévitablement de perte de repères et d’incertitude sur le terrain. Plus fondamentalement, est remise en question la place que l’on souhaite encore donner à l’action culturelle qui contribue à la construction d’une société démocratique et citoyenne. Dans le contexte actuel, la tentation est grande de faire jouer un rôle « curatif » au socioculturel alors qu’il participe d’une démarche d’émancipation, invitant aux échanges et à l’ouverture vers l’autre. Si l’action culturelle peut stimuler des réponses nouvelles, elle ne doit pas être réduite à panser les maux d’une société en crise.
Depuis le début de cette législature et à quelques exceptions près, les secteurs prennent connaissance des décisions les concernant au travers des comptes rendus de commissions parlementaires, de circulaires administratives ou parfois via des articles de presse sans qu’aucune concertation n’ait eu lieu avec les secteurs eux-mêmes, créant ainsi un profond malaise.
Unis et solidaires, les signataires de cet appel interpellent le monde politique pour attirer l’attention sur le mal-être de nos secteurs. Ce mal-être est le reflet des difficultés (moyens, emplois, etc.) rencontrées au quotidien par les opérateurs. Les mesures d’économies linéaires et l’incapacité à développer des marges de manœuvre financières conduisent à une situation de grande instabilité pour tous nos secteurs.
Afin d’empêcher une « guerre de pauvres » entre acteurs de la culture, la question du dialogue et de la construction collective des politiques culturelles n’a jamais été aussi présente.
Dans ce contexte, nous soulignons l’importance de restructurer de façon claire, pertinente, transparente et efficace le processus Bouger les lignes, pour « tracer les politiques culturelles du XXIème siècle » dans le cadre d’une démarche participative. Ce processus ne pourra être un succès qu’à la condition de se construire en dialogue avec les représentants de l’ensemble des secteurs de la culture. Sans cette garantie, c’est le risque de voir des réformes se dessiner sans bases solides et avec pour conséquence, une remise en cause de la légitimité de l’opération par les secteurs concernés.
Certes, le secteur socioculturel est un secteur mature, qui prend la mesure des difficultés budgétaires rencontrées par le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Même dans ce contexte défavorable, les opérateurs socioculturels remplissent leur part du contrat en assumant leurs missions, et ce avec moins de moyens et très souvent au prix de grands sacrifices (licenciements, restructurations involontaires, diminution des salaires d’un commun accord avec les travailleurs, etc.).
Parce que leur priorité reste les citoyens, hommes et femmes, avec qui ils tentent de construire la société, la démocratie, la culture de demain.
« Penser ce demain » en relevant de nouveaux défis, en rencontrant de nouveaux objectifs, en répondant à de nouvelles priorités, et cela dans une démarche propre au socioculturel, ne pourra se faire qu’en clarifiant les intentions du Gouvernement et en favorisant la participation des acteurs de terrain, des instances d’avis et des organisations représentatives des secteurs à la définition des orientations pour les années à venir.
Nos constats alarmants et notre demande urgente de concertation ont pu être entendus par la Ministre de la Culture avec qui une amorce de dialogue a été établie. L’organisation de concertation à différents niveaux, avec le politique, reste une priorité pour nos organisations.
Il est en effet urgent de maintenir la confiance mutuelle et de redonner au socioculturel sa juste place dans notre société ! Sans quoi, comme le disait Albert Camus, « Tout ce qui dégrade la culture raccourcit les chemins qui mènent à la servitude ».
ACC, Association des Centres culturels de la Communauté française
APBD, Association Professionnelle des Bibliothécaires et Documentalistes
ASTRAC, Réseau des professionnels en Centres culturels
ASSPROPRO, Association des Programmateurs Professionnels en Communauté française
FESEFA, Fédération des Employeurs des Secteurs de l’Éducation permanente et de la Formation des Adultes
FIBBC, Fédération Interdiocésaine des Bibliothèques et Bibliothécaires Catholiques
FPCEC, Fédération pluraliste des Centres d’expression et de créativité
MSW, Musées et Société en Wallonie
25 juillet 2015